1713, 11 avril, Traité d’Utrecht

Traité de d’Utrecht, 11 avril 1713

entre la France et la Grande-Bretagne

Les Traités d’Utrecht sont deux Traités de paix signés à Utrecht (aux Provinces-Unies) en 1713 à la fin de la guerre de Succession d’Espagne. Ce Traité est le premier Traité signé le 11 avril entre le Royaume de France et le Royaume de Grande-Bretagne, le deuxième le 13 juillet entre l’Espagne et la Grande-Bretagne.

Les Traités d’Utrecht sont deux Traités de paix signés à Utrecht (aux Provinces-Unies) en 1713 à la fin de la guerre de Succession d’Espagne. Ce Traité est le premier Traité signé le 11 avril entre le Royaume de France et le Royaume de Grande-Bretagne, le deuxième le 13 juillet entre l’Espagne et la Grande-Bretagne.

La guerre de Succession d’Espagne oppose de 1700 à 1714 plusieurs puissances européennes, en premier lieu la France de Louis XIV et la maison des Habsbourg d’Autriche, soutenue par une vaste coalition incluant notamment l’Angleterre (Royaume-Uni à partir de 1707) et les Provinces-Unies.

Les traités d’Utrecht officialisent le passage de l’Espagne des Habsbourg aux Bourbons, qui règnent encore sur ce pays de nos jours, mais au prix de pertes territoriales pour l’Espagne, notamment au profit de la maison d’Autriche (Pays-Bas espagnols).

L’enjeu initial de cette guerre est la succession au trône d’Espagne après la mort sans descendance du dernier représentant de la maison des Habsbourg d’Espagne, Charles II, revendiquée par les Habsbourg d’Autriche et par le roi de France Louis XIV au nom de son petit-fils Philippe de Bourbon, duc d’Anjou. Louis XIV réussit à placer son petit-fils sur le trône espagnol, mais celui-ci se heurte à l’opposition d’une partie des Espagnols.

Traité de Paix et d’Amitié entre Louis XIV Roi de France et Anne Reine de la Grande Bretagne,

Etabli sur le fondement d’une Separation réelle et perpetuelle des Couronnes de France et d’ Espagne, par le moyen des Renonciations reciproques du Roi Philippe et des Ducs de Berri et d’Orléans qui y sont insérées : comme aussi sur la Reconnoissance que le Roi T. C. y fait, de la Succession à la Couronne de la Grande-Bretagne dans la Ligne Protestante de Hanover, avec promesse de ne jamais rien faire, ni permettre qu’il soit fait, directement ou indirectement, en faveur de ceux qui voudroient la troubler.. Le Roi T. C, y promet de plus de faire raser Dunkerque, et il y cede à la Couronne d’Angleterre, divers grands Païs dans l’ Amerique Septentrionale. 

Fait a Utrecht le 31. Mars / Avril 1713. 

Avec les Plein-pouvoirs de part et d’autre, et la Ratification du Roi T. C. donnée a Versailles le 18. Avril 1713. 

Louis par la grace de Dieu, Roi de France et de Navarre à tous ceux qui ces présentes Lettres verront, Salut. Comme nôtre très cher et bien aimé Cousin le Marquis d’Huxelles, Marechal de France. Chevalier de nos Ordres,  et notre Lieutenant Général au Gouvernement de Bourgogne, et notre très-cher et bien aimé, le Sieur Mesnager, Chevalier de nôtre Ordre de St. Michel, nos Ambassadeurs Extraordinaires et Plénipotentiaires, en vertu des Pleinpouvoirs que nous leur avions donné, auraient conclu, arrêté et signé à Utrecht le onziéme du présent mois d’Avril, avec le Sr. Jean Evêque de Bristol, Garde du Sceau privé d’Angleterre, Conseiller de notre très-chére et très-aimée Sœur, la Reine de la Grande-Bretagne, en son Conseil d’État, Doyen de Windsor et Secrétaire de l’Ordre de la Jarretière, et le Sr. Thomas Comte de Strafford, Vi-comte de Wentworth, Woodhouse, et de Stainborough, Baron d’Oveisley, Neumarch, et Raby, Conseiller de nôtredite Sœur en son Conseil d’État, son Ambassadeur Extraordinaire et Plénipotentiaire au-près des États Généraux des Provinces-Unies des Pays-Bas, Colonel de son Régiment Royal de Dragons; Lieutenant Général de ses Armées, premier Seigneur de l’Amirauté de la Grande-Bretagne et d’Irlande, Chevalier de l’Ordre de la Jarretière, en qualité d’Ambassadeurs Extraordinaires et Plénipotentiaires de nôtre dite Sœur pareillement, munis de ses Pleinpouvoirs; le Traité de Paix dont la teneur s’ensuit. 

D’autant qu’il a plu à Dieu tout puissant et miséricordieux pour la gloire de son St Nom et pour le Salut du Genre humain d’inspirer en son tems aux Princes le désir réciproque d’une réconciliation qui fit cesser les malheurs qui désolent la terre depuis si long-tems, qu’il soit notoire à tous et à chacun à qui il appartiendra que par la direction de la Providence Divine, le Sérénissime et très-Puissant Prince Louïs XIV. par la grâce de Dieu Roy T. C. de France et de Navarre, et la Sérénissime et très-Puissante Princesse Anne, par la grâce de Dieu, Reyne de la Grande-Bretagne, remplis du désir de procurer (autant qu’il est possible à la prudence humaine de le faire) une tranquillité perpétuelle à la Chrêtienté, et portez par la considération de l’intérest de leurs Sujets, sont enfin demeurez d’accord de terminer cette guerre, si cruelle par le grand nombre de combats, si funeste par la quantité du sang Chrétien qu’on y a versé, laquelle après s’être malheureusement allumée il y a plus de dix ans, a toujours continué depuis avec opiniatreté. 

Leurs susdites Majestés, afin de poursuivre un projet si digne d’Elles, ont nommé et constitué de leur propre mouvement, et par le soin paternel qu’elles ont pour leurs Sujets et pour la Chrêtienté, leurs Ambassades Extraordinaires et Plénipotentiaires respectifs, sçavoir Sa Majesté Très Chrétienne, le Sieur Nicolas Marquis d’Huxelles Marechal de France, Chevalier des Ordres du Roy, Lieutenant Général au Gouvernement de Bourgogne, etc., et le Sieur Nicolas Mesnager, Chevalier de l’Ordre de St Michel ; Et Sa Majesté Britannique, le Bien Reverend Jean Evesque de Bristol, Garde du Sceau privé d’Angleterre, Conseiller de la Reyne en son Conseil d’Etat, Doyen de Windsor, et Secrétaire de l’Ordre de la Jarretière, et le Sieur Thomas Comte de Strafford, Vicomte de Wentworth, Woodhouse, et de Stainborough, Baron de Neumarch, Oversley, et Raby, Conseiller de la Reyne en son Conseil d’Etat, son Ambassadeur Extraordinaire et Plénipotentiaire auprès des États Généraux des Provinces-Unies, Colonel du Régiment Royal de Dragons de Sa Majesté ; Lieutenant Général de ses Armées, premier Seigneur de l’Amirauté de la Grande Bretagne et d’Irlande, et Chevalier de l’Ordre de la Jarretière, auxquels leurs Majestés Royales ont donné leurs Pleinspouvoirs pour traiter, convenir, et conclure une Paix ferme et stable. 

Les susdits Ambassadeurs Extraordinaires et Plénipotentiaires après plusieurs Conferences épineuses tenues dans le Congrez étably pour cette fin à Utrecht ayant enfin surmonté, sans l’intervention d’aucune Médiation, tous les obstacles qui s’opposoient à l’accomplissement d’un dessein si salutaire, et après avoir demandé à Dieu qu’il daignât conserver à jamais leur ouvrage en son entier, et qu’il en fit ressentir le fruit à la postérité la plus reculée, et s’être communiqué respectivement leurs Pleinspouvoirs dont les copies seront insérées de mot à mot à la fin du présent Traité, et en avoir duement fait l’échange, sont enfin convenus des Articles d’une Paix et Amitié mutuelle entre leurs dites Majestés Royales, leurs Peuples et Sujets de la manière qui suit. 

Art. 1 – Il y aura une Paix universelle et perpétuelle, une vraie et sincere amitié entre le Sérénissime et très-Puissant Prince Louïs XIV, Roy Très-Chrêtien, et la Sérénissime et très-Puissante Princesse Anne, Reine de la Grande-Bretagne, leurs Héritiers et Successeurs ; leurs Royaumes, États et Sujets, tant au dedans qu’au dehors de l’Europe ; cette Paix sera inviolablement observée entre eux si religieusement et sincèrement qu’ils feront mutuellement tout ce qui pourra contribuer au bien, à l’honneur, et à l’avantage l’un de l’autre, vivant en tout comme bons voisins et avec une telle confiance et si réciproque que cette amitié soit de jour en jour fidèlement cultivée, affermie, et augmentée. 

Art. 2 – Toutes inimitiez, hostilitez, guerres et discordes entre ledit Roy Très-Chrêtien et ladite Reyne de la Grande-Bretagne et pareillement entre leurs Sujets, cesseront et demeureront éteintes et abolies, en sorte qu’ils éviteront soigneusement à l’avenir de se faire de part ni d’autre aucun tort, injure ou préjudice, et qu’ils s’abstiendront de s’attaquer, piller, troubler, ou inquiéter en quelque maniére que ce soit par terre, par mer, ou autres eaux dans tous les endroits du monde, et particulièrement dans toute l’étendue des Royaumes; Terres et Seigneuries dud. Roy et de lad. Reyne sans aucune exception. 

Art. 3 – Tous les torts, dommages, injures, offenses que led. Roy T. C. et lad. Reyne de la G.B. et leurs Sujets auront soufferts et reçus les uns des autres pendant cette guerre, seront absolument oubliez ; et leurs Majestez et leurs Sujets, pour quelque cause ou occasion que ce puisse être, ne feront désormais, ni ne commanderont, ou ne souffriront qu’il soit réciproquement fait de part, ni d’autre, aucun acte d’hostilité, ou d’injustice, trouble ou préjudice, de quelque nature ou maniére que ce puisse être, par autruy ou par soi-mesme, en public ou en secret, directement ou indirectement, par voye de fait ou sous prétexte de justice. 

Art. 4 – Et pour affermir de plus en plus l’amitié fidele et inviolable qui est établie par cette Paix, et pour prévenir tous prétextes de défiance qui pourroient naistre, en quelque tems que ce soit, à l’occasion de l’ordre et Droit de Succession héréditaire établie dans le Royaume de la G. B. de la manière qu’elle a été limitée par les Loix de la G. B. tant sous le Regne du Roy Guillaume III. de très-Glorieuse Mémoire, que sous le présent Régne de lad. Reyne, en faveur de ses Descendans ; et au défaut d’iceux, en faveur de la Sérénissime Princesse Sophie, Doüairiere de Brunswick-Hannover, et ses Héritiers dans la Ligne Protestante d’Hannover : Et afin que cette Succession demeure ferme et stable, le Roy T. C. reconnoist sincèrement et solemnellement lad. Succession au Royaume de la G. B. limité comme dessus, et déclare et promet en foy et parole de Roy, tant pour luy que pour ses Héritiers & Successeurs, de l’avoir pour agréable à présent . et à toûjours, engageant à cet effet son honneur et celuy de ses Successeurs, promettant en outre sous la même foy et parole de Roy et sous le même Engagement d’honneur, tant pour luy que pour ses Héritiers et Successeurs, de ne reconnoistre jamais qui que ce soit pour Roy ou Reyne de la G. B., si ce n’est lad. Reyne et ses Successeurs selon l’Ordre de lad. limitation: Et afin de donner encore plus de force à cette reconnoissance et promesse, le Roy T..C. promet que luy et ses Successeurs et Héritiers apporteront tous leurs soins pour empescher que la personne qui du vivant du Roy Jacques II. avoir pris le titre de Prince de Galles, et au décès dud. Roy celui de Roy de la G. B., et qui depuis peu est sorti volontairement du Royaume de France pour demeurer ailleurs, ne puisse y rentrer, ni dans aucunes des Provinces de ce Royaume, en quelque tems et sous quelque prétexte que ce puisse être. 

Art. 5- Le Roy T. C. promet de plus tant en son nom que pour ses Héritiers et Successeurs, de ne jamais troubler, ni molester lad. Reyne de la G. B., ses Héritiers et Successeurs, issus de la Ligne Protestante, qui possederont la Couronne de la G. B. et les Etats qui en dépendent, et de ne donner ni luy, ni aucun de ses Successeurs, directement ou indirectement, par Terre ou par Mer, en Argent, Armes, Munitions, appareil de Guerre, Vaisseaux, Soldats, Matelots, et en quelque manière ou en quelque tems que ce soit, aucune assistance, secours, faveur, ni conseil à aucune personne ou personnes quelles qu’elles puissent être, qui sous quelque prétexte ou cause que ce soit, voudroient s’opposer à l’avenir à lad. Succession soit ouvertement, ou en formentant des séditions et formant des conjurations contre tel Prince ou Princes, qui en vertu desd. Actes du Parlement occuperont le Throine de la G. B., ou contre le Prince ou la Princesse en faveur de qui lad. Succession à la Couronne de la G. B. sera ouverte par lesdits Actes du Parlement. 

Art. 6 – D’autant que la Guerre, que la présente Paix doit éteindre, a été allumée principalement parce que la seureté et la liberté de l’Europe ne pouvoient pas absolument souffrir que les Couronnes de France et d’Espagne fussent réünies sous une même teste, et que sur les instances de Sa Majesté Britannique, et du consentement tant de S. M. T. C. que de S. M. Cath: on est enfin parvenu, par un effet de la Providence Divine, à prévenir ce mal pour tous les temps à venir, moiennant des Rénonciations conçûes dans la meilleure forme, et faites en la manière la plus solemnelle dont la teneur suit ci-après. 

S’enfuivent ici les (1) Actes concernant les Rénonciations réciproques du Roy PHILIPPE d’une part, et de M. le Duc de Berry et de M. le Duc d’ORLEANS d’autre part, etc. 

Etant suffisamment pourvû par la rénonciation ci-relative, laquelle doit être éternellement une Loi inviolable et toujours observée, à ce que le Roy Catholique, ni aucun Prince de sa postérité, puisse jamais aspirer ni parvenir à la Couronne de France; et d’une autre costé les rénonciations réciproques à la Couronne d’Espagne faites par la France, ainsi que les autres actes qui établissent la Succession héréditaire à la Couronne de France, lesquelles tendent à la même fin; ayant aussi suffisamment pourvû à ce que les Couronnes de France et d’Espagne demeurent séparées et désunies, de manière que les susd. Rénonciations et les autres Transactions qui les regardent, subsistant dans leur vigueur et étant observées de bonne foi, ces Couronnes ne pourront jamais être réünies: Ainsi le Sérénissime Roi T. C. et la Sérénissime Reine de la Grand-Bretagne s’engagent Solemnellement, et par parole de Roi, l’un à l’autre, qu’eux ni leurs Héritiers et Successeurs ne feront jamais rien, ni ne permettront que jamais il soit rien fait capable d’empêcher les Rénonciations et autres Transactions dusd. D’avoir leur plein et entier effet; au contraire leurs Majestez Royales prendront un soin sincère et seront leurs efforts, afin que rien ne donne atteinte à ce fondement du salut public, ni ne puisse l’ébranler: En outre S.M.C. demeure d’accord et s’engage que son intention n’est pas de tâcher d’obtenir, ni même d’accepter à l’avenir que pour l’utilité de ses sujets, il soit rien changé, ni innové dans l’Espagne ni dans l’Amérique Espagnole; tant en matiére de Commerce qu’en matière de Navigation, aux usages pratiquez en ces Païs sous le Regne du feu Roi d’Espagne Charles II, non plus que de procurer à ses sujets dans les susd. Païs aucun avantage qui ne soit pas accordé de même dans toute son étendue aux autres Peuples et Nations lesquelles y négocient. 

Art. 7 – La Navigation et le Commerce seront libres entre les Sujets de leursd. Majestés, de même qu’ils l’ont toûjours été en tems de Paix, et avant la Déclaration de la derniere Guerre, et particulièrement de la maniére dont on est convenu entre les deux Nations par un Traité de Commerce aujourd’hui conclu. 

Art. 8 – Les voyes de la Justice ordinaires seront ouvertes et le cours en sera libre réciproquement dans tous les Royaumes, Terres et Seigneuries de l’obéissance de leurs Majestez, et leurs Sujets de part et d’autres pourront librement y faire valoir leurs Droits, actions et prétentions, suivant les Loix et Statuts de chaque Païs. 

Art. 9 – Le Roi T.C. fera raser toutes les Fortifications de la Ville de Dunkerque, combler le Port, ruiner les Écluses, qui servent au nétoiement dud. Port, le tout à ses dépens et dans le terme de cinq mois après la Paix concluë et signée, sçavoir les ouvrages de Mer, et ceux de terre avec lesd. Fortifications, Ports et Ecluses ne pourront jamais être rétablis, laquelle démolition toutefois ne commencera qu’après que le roi T.C. aura été mis en possession généralement de tout ce qui doit être cédé en équivalent de susd. démolition.

Art. 10 – Le Roi T.C. restituera au Royaume et à la Reine de la G.B, pour les posséder en plein Droit et perpétuïté, la Baye et le Détroit d’Hudson avec toutes les Terres, Mers, Rivages, Fleuves et lieux qui en dépendent et qui y sont situez, sans rien excepter de l’étendue desd. Terres et Mers possedez présentement par les Froançois; le tout aussi bien que tous les Edifices et Forts construits, tant avant que depuis que les François s’en sont rendus Maistres, seront délivrez de bonne-foy en leur entier; et en l’état où ils sont présentement, sans en rien démolir, avec tout l’Artillerie, les Boulets, la quantité de poudre proportionnée à celle des Boulets (si elle s’y trouve) et tout autre choses servant à l’Artillerie, à ceux des Sujets de la Reine de la G.B. munis de ses Commissions pour les demander et recevoir dans l’espace de six mois, à compter du jour de la ratification du présent Traité, ou plustôt si faire se peut, à condition toutefois qu’il sera permis à la Compagnie de Québec et à tout autres Sujets quelconques du Roy T.C. de se retirer desd. Terres et Détroit, par terre ou par mer, avec tous leurs Biens, Marchandises, Armes, Meubles et Effets de quelconque nature ou espéce qu’ils soient, à la réserve de ce qui a été excepté cy-dessus. Quant aux limites, entre la Baye d’Hudson et les lieux appartenant à la France, on est convenu réciproquement qu’il sera nommé des Commissaires de part et d’autre, qui les détermineront dans le terme d’un an, et il ne sera pas permis aux Sujets des deux Nations de passer lesd. limites pour aller les uns aux autres, ni par mer, ni par terre. Les mêmes Commissaires auront le pouvoir de régler pareillement les limites entre les autres Colonies Françaises et Britanniques dans ces Païs-là. 

Art. 11 – Le Roy T. C. fera donner une juste et équitable satisfaction aux Intéressez de la Compagnie Angloise de la Baye d’Hudson, des pertes et dommages qu’ils peuvent avoir soufferts pendant la paix, de la part de la Nation Françoise par des Courses ou déprédations tant en leurs personnes que dans leurs Colonies, Vaisseaux et autres Biens, dont l’estimation sera faite par des Commissaires qui seront nommés à la réquisition de l’une ou de l’autre des Parties. Les mêmes Commissaires prendront connoissance des plaintes qui pourront être faites tant de la part des Sujets de la G. B. touchant les Vaisseaux pris par les François durant la Paix et les dommages qu’ils pourront avoir soufferts l’année derniére dans l’Isle de Monserrat, ou autres, que de la part des Sujets de la France touchant les Capitulations faites dans l’Isle de Nevis et au Fort de Gambi et des Vaisseaux François qui pourroient avoir été pris par les Sujets de la G. B. en temps de paix, et toutes autres contestations de cette nature, meus entre les deux Nations, et qui n’ont point encore été réglées ; et il en sera fait de part et d’autre bonne et prompte justice. 

Art. 12 – Le Roi T.C. fera remettre à la Reine de la G.B. le jour de l’échange des Ratifications du présent Traité de Paix, des Lettres et Actes authentiques qui feront foy de la cession faite à perpetuïté à la Reine et à la Couronne de la G.B. de l’Isle de St. Christophle que les Sujets de Sa Majesté Brit. désormais possederont seuls ; De la nouvelle Écosse autrement dite Acadie, en son entier, conformément à ses anciennes limites, comme aussi de la Ville de Port-Royal ; maintenant appellée Annapolis Royale, et généralement de tout ce qui dépend desd. Terres et Isles de ce Païs-là, avec la Souveraineté, la proprieté, la possession et tous Droits acquis par Traitez ou autrement que le Roy T.C., la Couronne de France ou ses Sujets quelconques ont eu jusqu’à présent sur lesd. Isles, Terres, lieux, et leurs habitants, ainsi, que le Roy T.C. cede et transporte le tout à lad. Reine, et à la Couronne de la G.B., et cela d’une maniére et d’une forme si ample qu’il ne sera pas permis à l’avenir aux Sujets du Roi T.C. d’exercer la pêche dans lesd. Mers, Bayes, et autres endroits à trente lieuës près des costes de la nouvelle Écosse au Sudest, en commençant depuis l’Isle appellée vulgairement de Sable inclusivement, et en tirant au Sud-Ouest. 

Art. 13 – L’Isle de Terreneuve avec les Isles adjacentes, appartiendra désormais et absolument à la G.B., et à cette fin le Roi T.C. fera remettre à ceux qui se trouveront à ce commis en ce Païs-là, dans l’espace de sept mois à compter du jour de l’échange des Ratifications de ce Traité, ou plutost si faire se peut, la Ville et le Fort de Plaisance, et autres lieux que les Francois pourroient encore posséder dans ladite Isle, sans que ledit Roy T.C. ses Héritiers et Successeurs, ou quelques uns de ces sujets puissent désormais prétendre quoique ce soit, et en quelques tems que ce soit, sur ladite Isle, et les Isles adjacentes en tout, ou en partie. Il ne leur sera pas permis non plus d’y fortifier aucun lieu, ni d’établir aucune habitation en façon quelconque, si ce n’est des échafauts et cabanes nécessaires et usitées pour pecher le poisson, ni aborder dans ladite Isle dans d’autres temps, que celui qui est propre pour pêcher, et nécessaire pour sêcher le poisson. Dans ladite Isle il ne sera pas permis aux-dits Sujets de la Fr. de pescher et de sécher le poisson en aucune autre partie, que depuis le lieu appelle Cap de Bona Vista, jusqu’à l’extremité septentrionale de ladite Isle et de là en suivant la partie occidentale, jusqu’au lieu appellé Pointe-Riche. Mais l’Isle dite Cap-Breton et toutes les autres quelconques, situées dans l’embouchure et dans le Golphe de St. Laurent, demeureront à l’avenir à la France, avec l’entiere faculté au Roy T.C. d’y fortifier une ou plusieurs Places. 

Art. 14 – Il a est expressément convenu que dans tous les lieux et Colonies qui doivent être cedés ou restitués en vertu de ce Traité par le Roy T.C., les Sujets dudit Roy auront la liberté de se retirer ailleurs dans l’espace d’un an avec tous leurs effets mobiliaires, qu’ils pourront transporter où il leur plaira, Ceux néanmoins qui voudront y demeurer et rester sous la domination de la G.B. doivent jouir de l’exercice de la Religion Catholique Romaine entant que le permettent les Loix de la G.B. 

Art. 15 – Les habitants du Canada et autres Sujets de la France, ne molesteront point à l’avenir les cinq Nations ou Cantons des Indiens foûrnis à la G.B. ni les autres Nations de l’Amérique, amies de cette Couronne. Pareillement les Sujets de la G.B. se comporteront pacifiquement envers les Américains Sujets ou amis de la France, et les uns et les autres jouiront d’une pleine liberté de se fréquenter pour le bien du Commerce, et avec la même liberté les habitans de ces Regions pourront visiter les Colonies Françoises et Britanniques pour l’avantage réciproque du Commerce sans aucune molestation, ni empêchement de part, ni d’autre. Au surplus, les Commissaires régleront exactement et distinctement, quels seront ceux qui seront ou devront être censez Sujets et amis de la France, ou de la G.B. 

Art. 16 – Toutes les Lettres, tant de représailles que de marque et de contremarque qui ont été délivrées jusqu’à présent pour quelque cause, et occasion que ce puisse être, demeureront et seront reputées nulles, inutiles, et sans effet, et à l’avenir aucune desd. Majestez n’en délivrera de semblables contre les Sujets de l’autre s’il n’apparoist auparavant d’un délay ou d’un deny de justice manifeste, ce qui ne pourra être tenu pour constant à moins que la Requeste de celuy qui demandera des Lettres de réprésailles, n’ait été rapportée ou représentée au Ministre ou Ambassadeur qui sera dans le Païs de la part du Prince contre les Sujets duquel on poursuivra lesdites Lettres, afin que dans l’espace de quatre mois il puisse s’éclaircir du contraire, ou faire en sorte que le Défendeur satisfasse incessamment le Demandeur, et s’il ne se trouve sur le lieu aucun Ministre ou Ambassadeur du Prince contre les Sujets duquel on demandera lesdites Lettres, l’on ne les expediera encore qu’après quatre mois expirez a compter du jour que la Requeste de celui qui demandera lesdites Lettres, aura été présentée au Prince contre les Sujets duquel on les demandera, ou à son Conseil privé. 

Art. 17 – D’autant que dans les Articles de la suspension d’armes conclue le 1/2 Aoust et prorogée ensuite pour quatre mois entre les Parties contractantes, il est expressément stipulé en quels cas les Vaisseaux, Marchandises et autres effets pris de part et d’autre doivent demeurer à celui qui s’es est rendu Maistre, ou être restituer à leur premier Propriétaire,  il a été convenu que dans lesdits cas les conditions de la suspension d’armes demeureront en toute vigueur, et que tout ce qui concernera ces sortes de prises faites, soit dans les Mers Britanniques et Septentrionale, ou par tout ailleurs, sera exécuté de bonne foy, selon leur teneur. 

Art. 18 – Que s’il arrivoit par hazard, inadvertance, ou autre cause quelle qu’elle puisse estre, qu’aucun des Sujets desd. Majestez fit, ou entreprit, quelque chose par terre, par mer ou autres eaux en quelque lieu du monde que ce soit, qui puisse contrevenir au présent Traité, et en empêcher l’entière execution, ou de quelqu’un de ses Articles en particulier, la Paix et bonne correspondance retablie entre ledit Roy T.C. et lad. Reyne de la G. B. ne sera pas troublée, ni censée interrompue à cette occasion, et elle demeurera toujours au contraire en son entiére et premiére force et vigueur; Mais seulement celuy desdits Sujets qui l’aura troublée, repondra de son fait particulier, et en sera puni conformément aux Loix en suivant les régles établies par le Droit des gens. 

Art. 19 – Et s’il arrivoit aussi (ce qu’à Dieu ne plaise) que les mésintelligences et inimitiez éteintes par cette Paix, se renouvellassent entre leursdites Majestez et qu’ils en vinssent à une guerre ouverte, tous les Vaisseaux, Marchandises, et tous les effets mobiliaires des Sujets de l’une des deux Parties qui se trouveront engagez dans les Ports et Lieux de la Domination de l’autre, n’y feront point confisqués ni en aucune façon endommagez. Mais, l’on donnera aux Sujets desdites Majestez le terme de six mois entiers à compter du jour de la rupture, pendant lesquels ils pourront sans qu’il leur soit donné aucun trouble ni empêchement, vendre, enlever ou transporter où bon leur semblera, leurs biens de la nature cy-dessus exprimée et tous leurs autres effets, et se retirer eux-mêmes.

Art. 20 – Il sera donné à tous et à chacun des Hauts-Alliés de la Reine de la G. B. une Satisfaction juste et équitable; sur ce qu’ils peuvent demander légitimement à la France. 

Art. 21 – Le Roy T. C. en considération de la Reine de la G. B. consentira que dans le Traité à faire avec l’Empire, tout ce qui regarde dans ledit Enpire l’état de la Réligion, soit conforme à la teneur des Traitez de Westphalie, ensorte qu’il paroisse manifestement que l’intention de S.M. T. C. n’est point et n’a point esté, qu’il y ait rien de changé auxdits Traitez. 

Art. 22 – Le Roy T. C. promet encore qu’il fera. incessamment après la Paix faite, faire Droit à la Famille d’Hamilton au sujet du Duché de Châtelleraut, au Duc de Richemont sur les prétentions qu’il a en France, comme aussi au Sr. Charles Douglas touchant quelques Terres enfonds qu’il repete, et à d’autres particuliers.

Art. 23 – Du consentement réciproque du Roy T.C. et de la Reyne de la G. Bretagne, les Sujets de part et d’autre faits prisonniers pendant la guerre, seront remis en liberté sans distinction et sans rançon, en payant les dettes qu’ils auront contractées durant leur captivité.

Art. 24 – Le Traité de Paix signé aujourd’huy entre S.M.T.C. et S.M. Portugaise fera partie du présent Traité, comme s’il estoit inséré icy mot à mot, Sa Majesté la Reyne de la G.B. déclarant qu’Elle a offert la Garantie, laquelle elle donne dans les formes les plus solemnelles pour la plus exacte observation et exécution de tout le contenu dans ledit Traité. 

Art. 25 – Le Traité de Paix de ce jourd’huy entre S.M.T.C et son Altesse Royale de Savoye est spécialement compris et confirmé par le présent comme partie essentielle d’iceluy, et comme si ledit Traité estoit inséré icy mot à mot, Sa Majesté le Reyne de la G.B. s’engageant expressement aux mêmes promesses de maintenance et de garantie stipulées par ledit Traité, ou celles par elle cy-devant promises. 

Art. 26 – Le Sérénissime Roy de Suede, les Royaumes, Territoires, Provinces et Droits, comme aussi le Grand Duc de Toscane, la République de Gennes et le Duc de Parme, sont inclus dans ce Traité de la meilleure maniére. 

Art. 27 – Leurs Majestez ont aussi-bien voulu comprendre dans ce Traité les Villes Anséatiques, nommément Lubeck, Brême, et Hambourg, et la Ville de Dantzick, à cet effet qu’après que la Paix générale sera faite, elles puissent jouïr à l’avenir, comme amis communs, des mêmes émolumens dans le Commerce avec l’un et l’autre Royaume dont ils ont cy-devant jouï en vertu des Traitez, ou anciens usages.

Art. 28 – Seront en outre compris dans le présent Traité de Paix, ceux qui, avant l’échange des Ratifications qui en seront fournies, ou dans l’espace de six mois après, seront nommez à cet effet de part et d’autre et dont on conviendra réciproquement. 

Art. 29 – Enfin les Ratifications solemnelles du présent Traité, expédiées en bonne et due forme, seront raportées et échangées de part et d’autre à Utrecht, dans l’espace de quatre semaines, ou plutost s’il est possible, à compter du jour de la signature. 

Art. 30 – En foy de quoy, nous soussignez Ambassadeurs Extraordinaires et Plénipotentiaires du Roy T.C. et de la Reyne de la G.B. avons signé les présents Articles de nôtre main et y avons fait apposer les Cachets de nos Armes. 

Fait à Utrecht le 11 Avril, 1773. 

Huxelles. (L.S.)

Joh. Bristol. C.P.S. (L.S.)

Mesnager. (L.S.)

Strafford. (L.S.)

Le texte du traité est publié in

| 5,5 Mo Dumont, t. VIII, part. 1, n° CLI, pp. 339-342

Pour les références bibliographiques des recueils mentionnés ci-dessous, voy. la page consacrée aux recueils de traités

La présente fiche a été réalisée dans le cadre du programme de stage du Céric à la Faculté de Droit et de Science politique de l’Université d’Aix-Marseille.

Elle a été conçue par :

Lisa Lenglart (fiche de contextualisation, illustration, résumé, transcription du texte intégral)

Anna Elliott (travail de vérification)

Pr. Romain Le Boeuf (sources, transcription du texte intégral)

Crédits image : Wikipédia