Traité de Nankin, 29 août 1842
entre la Chine et le Royaume-Uni
Le traité de Nankin du 29 août 1842 a été signé entre le Royaume-Uni et la Chine. Il a mis fin à la première guerre de l’opium (1839-1842).
La guerre de l’opium est un conflit majeur, motivé par des raisons commerciales. En effet, la dynastie de Qing voulait interdire l’opium en Chine qui venait principalement de marchands britanniques. L’attaque anglaise a été lancée après l’ordre chinois de brûler l’opium confisqué aux commerçands anglais.
Suite à la défaite chinoise, le traité prévoit que la dynastie de Qing devra céder Hong Kong, payer de lourdes indemnités ainsi que d’ouvrir des ports pour le commerce extérieur, comme celui de Shangai. Cela aura également pour conséquence plus lointaine la révolte des Taiping, une guerre civile qui durera 15 ans (1851-1864).
Ce traité marque une défaite humiliante pour la Chine ainsi que le début du déclin de l’empire chinois (dynastie Qing). Cet accord fait notamment parti des premiers traités dits « inégaux » (terme théorisé par Sun Yat-Sen). Il s’agit d’un ensemble de traités du 19ème siècle entre les puissances asiatiques et occidentales considérés comme déséquilibrés.
Traité entre S. M. la reine de la Grande-Bretagne et d’Irlande, et S. M. impériale l’Empereur de Chine, signé à Nanking, en langues anglaise et chinoise, le 29 août 1842.
S. M. la reine du Royaume-Uni de la Grande-Bretagne et d’Irlande, et S. M. l’Empereur de Chine, étant animés d’un égal désir de mettre fin à la mésintelligence et aux hostilités survenues entre les deux pays, ont résolu, pour arriver à ce résultat, de conclure un traité; et, à cet effet, ont nommé pour leurs plénipotentiaires, savoir:
S. M. la reine de la Grande-Bretagne et d’Irlande, Sir Henry Pottinger, baronnet, major-général au service de la Compagnie des Indes-Orientales, etc.;
S. M. impériale l’Empereur de Chine, les hauts-commissaires Ki-Yng, de la maison impériale, un des tuteurs du prince héréditaire et général commandant la garnison de Canton; et Eli-Pou, membre de la famille impériale, autorisé, par faveur spéciale, à porter les insignes du premier degré et décoré de la plume de paon; ancien ministre et gouverneur-général, etc., et présentement lieutenant-général, commandant à Fcha-pou;
Lesquels, après s’être communiqué leurs pleins pouvoirs respectifs, et les avoir trouvés en bonne et due forme, sont convenus des articles suivants:
ART. 1 – Il y aura désormais paix et amitié entre S. M, la reine du Royaume-Uni de la Grande-Bretagne et d’Irlande, et S. M. l’Empereur de Chine, comme aussi entre leurs sujets respectifs, qui jouiront d’une entière sécurité et protection, pour leurs personnes et pour leurs propriétés, dans les possessions de l’une ou l’autre puissance.
ART. 2 – S. M. l’Empereur de Chine consent à ce que les Sujets britanniques, avec leurs familles et établissements, puissent résider, sans vexation ni contrainte, et en vue de poursuivre leurs opérations commerciales, dans les cités et villes de Canton, Emouy, Fou-tchou-fou, Ning-po et Schang-hae; et de son côté, S.-M, la reine de la Grande-Bretagne, etc., nommera des surintendants ou officiers consulaires pour résider dans chacune desdites cités ou villes, pour être les intermédiaires des communications entre les autorités chinoises et lesdits commercans, et pour veiller à ce que les droits légaux et autres redevances dues au gouvernement chinois (au réglement desquels il sera ultérieurement pourvu) soient dûment acquittés par les sujets de S. M. britannique.
ART. 3 – Comme il est évidemment indispensable et désirable que les sujets britanniques aient un port où ils puissent, au besoin, charger et réparer leurs bateaux, et aussi pour y déposer leurs provisions, S. M. l’Empereur de Chine cède à S. M. la reine de la GrandeBretagne, etc., l’île de Hong-Kong, pour être possédée à perpétuité par S. M. britannique, par ses héritiers et successeurs, et pour être gouvernée par telles lois ou règlements qu’il conviendra à S. M. la reine de la Grande-Bretagne d’ordonner.
ART. 4 – L’Empereur de Chine consent à payer la somme de six millions de dollars pour valeur de l’opium livré à Canton, en mars 1839, comme rançon du surintendant et des sujets de S. M. britannique, emprisonnés et menacés de mort par les hautes-officiers chinois.
ART. 5 – Le gouvernement chinois, ayant contraint les négociants page 2 britanniques, trafiquant à Canton, à traiter exclusivement avec certains négociants chinois appelés Hanistes, ou Co-hong, et autorisés à cet effet par le dit gouvernement, L’Empereur de Chine consent à abolir cet usage, pour l’avenir, dans tous les ports où pourront résider des négociants britanniques, et à permettre à ces derniers de poursuivre leurs opérations commerciales avec les personnes qu’il leur conviendra; et S. M. impériale consent en outre à payer au gouvernement britannique la somme de trois millions de dollars pour dettes contractées envers des sujets britanniques, par quelques-uns desdits Hanistes ou Co-hong, qui, étant devenus insolvables, sont restés débiteurs de très-fortes sommes d’argent envers les sujets de S. M. britannique.
ART. 6 – Le gouvernement de S. M. britannique ayant été obligé d’envoyer une expédition pour demander et obtenir réparation des procédés violents et injustes des hautes autorités chinoises envers un officier et des sujets de S. M. britannique, l’Empereur de Chine consent à payer la somme de douze millions de dollars comme indemnité pour les dépenses que ces faits ont occasionnées; et de son côté, le plénipotentiaire de S. M. britannique, de son plein gré et au nom de S. M.; consent à déduire de ladite somme de douze millions de dollars, toutes les sommes qui auraient été perçues par les forces réunies de S. M., pour rançon de villes ou cités de la Chine, postérieurement au 1er août 1841.
ART. 7 – Il est convenu que le total général de vingt-et-un millions de dollars détaillé dans les trois articles précédents, sera payé comme suit:
Six millions immédiatement;
- Six millions en 1843: c’est-à-dire trois millions au 30 juin, et trois millions au 31 décembre;
- Six millions en 1844: c’est-à-dire deux millions et demi au 30 juin, et deux millions et demi au 31 décembre;
- Quatre millions en 1845: c’est-à-dire, deux millions au 30 juin, et deux millions au 31 décembre.
Et il est, en outre, stipulé qu’un intérêt annuel, au taux de 5 pour 100, sera servi par le gouvernement chinois pour toutes sommes ou fractions de sommes qui n’auraient pas été dûment acquittées aux termes convenus.
ART. 8 – L’Empereur de Chine est convenu de mettre en liberté, sans conditions, les sujets de S. M. britannique (originaires de l’Europe ou de l’Inde) qui pourraient, en ce moment, se trouver emprisonnés dans quelque lieu que ce fait de l’empire chinois.
ART. 9 – L’Empereur de Chine convient de publier et promulguer, sous son sceau et son sceau impérial, une amnistie pleine et entière pour tous les sujets de l’empire chinois qui auraient eu des relations avec le gouvernement de Sa Majesté britannique ou avec les officiers de Sa Majesté, que ce soit en traitant avec ce gouvernement, en servant sous ses ordres ou en résidant sur un territoire soumis à son autorité; et Sa Majesté impériale s’engage également à mettre en liberté tous les sujets chinois qui sont actuellement détenus pour des faits analogues.
ART. 10 – Sa Majesté l’empereur de Chine convient d’établir, pour chacun des ports qui doivent, en vertu de l’article 2 du présent traité, être ouverts à la fréquentation des négociants britanniques, un tarif régulier et équitable des droits et autres redevances d’exportation et d’importation, lequel tarif sera publiquement notifié et promulgué pour servir d’information générale; et l’empereur s’engage également à ce que, chaque fois que des marchandises britanniques auront déjà payé les droits et redevances établis conformément au tarif qui sera ultérieurement déterminé, ces marchandises puissent être transportées par les négociants chinois dans n’importe quelle province ou ville de l’intérieur de l’empire chinois, moyennant le paiement d’un montant supplémentaire pour les droits de transit: ces droits ne peuvent toutefois pas dépasser 1% de la valeur tarifée de ces marchandises.
ART. 11 – Il est convenu que le haut-officier suprême de Sa Majesté britannique en Chine correspondra avec les hauts-officiers chinois, tant de la capitale que de la province, à titre de communication; les subordonnés britanniques et les hauts-officiers chinois des provinces, les premiers à titre de rapport et les seconds à titre de déclaration, et les subordonnés de chaque gouvernement entre eux, sur le pied page 3 d’une parfaite égalité; enfin les commerçants qui n’occuperaient pas de fonctions officielles, et qui, par conséquent, ne seraient pas compris dans une des clauses du présent article, se serviront du terme de réprésentation dans tout écrit par eux adressé aux gouvernements respectifs ou qui serait destiné à l’examen de ces gouvernements.
ART. 12 – Aussitôt qu’on aura reçu l’acquiescement de l’Empereur de Chine au présent traité, et que le paiement de la somme stipulée pour le premier terme aura été effectué, les forces de S. M. britannique se retireront de Nanking et du grand canal et n’inquiéteront ni n’arrêteront à l’avenir les opérations du commerce de la Chine. Le poste militaire établi à Tchin-hae sera également retiré; mais les îles de Kou-lang-sou et de Tchu-san continueront à être occupées par les troupes de S. M. jusqu’au paiement intégral des sommes stipulées et à la conclusion définitive des arrangemens pour l’ouverture des ports ouverts aux négociants britanniques.
ART. 13 – Les ratifications du présent traité par S. M. la reine de la Grande-Bretagne, etc., et par S. M. l’Empereur de Chine, seront échangées aussitôt que le permettra la grande distance qui sépare l’Angleterre de la Chine; mais, dans l’intervalle, on communiquera réciproquement des copies par duplicata du présent traité signées et scellées par les plénipotentiaires au nom de leurs souverains respectifs, toutes les provisions et dispositions dudit traité sortant dès à présent leur plein et entier effet.
Fait à Nanking, et signé et scellé par les plénipotentiaires, à bord du vaisseau de S. M. britannique le Cornwallis, ce vingt-neuf août 1842; jour correspondant à la date chinoise du vingt-quatrième jour du septième mois de la vingt-deuxième année de Taou-Kouang.
(L. S.) Henry Pottinger, Plénipotentiaire de S. M.
Sceau du Haut-Commissaire chinois,
Signature du troisième Plénipotentiaire chinois.
Signature du deuxième Plénipotentiaire chinois.
Signature du premier Plénipotentiaire chinois.
Le texte du traité est publié in | 1,3 Mo Martens, N. R. G., t. III, n° 54, pp. 484-488
Pour les références bibliographiques des recueils mentionnés ci-dessous, voy. la page consacrée aux recueils de traités
La présente fiche a été réalisée dans le cadre du stage du CERIC à l’Université d’Aix-Marseille.
Elle a été conçue par :
Serena Delle Case (fiche de contextualisation, illustration, résumé)
Margaux Chatain (correction du texte intégral)
Marie Albano (relecture)
Pr. Romain Le Boeuf (sources, transcription du texte intégral)
Crédits image : Wikipédia