1801, 6 juin, Traité de Badajoz

Traité de Badajoz, 6 juin 1801

entre la France et le Portugal

Le traité de Badajoz met fin à la guerre des Oranges entre l’Espagne et le Portugal, dans laquelle la France a été fortement impliquée.

C’est en 1801, suite à un ultimatum, que l’Espagne, alliée à la France de Napoléon Bonaparte, déclare la guerre au Portugal. En effet, depuis le traité de San Ildefonse en 1796, la France est alliée à l’Espagne contre l’Angleterre. En effet, voulant limiter la puissance de l’Angleterre, la France et l’Espagne ont imposé toutes sortes de restrictions au Portugal, comme la fermeture de ses ports aux Anglais. Face au refus des Portugais, la guerre des Oranges (mai 1801 – juin 1801) fut déclarée.

Ce n’est qu’après 17 jours de combat, le 6 juin 1801, que le Portugal signa le traité de Badajoz. Ce traité fut signé entre l’Espagne et le Portugal, mais aussi entre la France et le Portugal, posant les conséquences de la guerre, notamment la cession de territoires portugais à l’Espagne.

Cependant, du côté français, Napoléon Bonaparte ne ratifia pas le traité qu’il ne trouvait pas assez contraignant, ce qui donna lieu à l’accord de Madrid.

Son Altesse Royale le prince régent du royaume de Portugal et des Algarves, et le premier consul de la République française au nom du peuple français, voulant faire la paix par la médiation de Sa MAjesté Catholique, ont donné leurs pleins pouvoirs à cet effet , savoir : Son Altesse Royale à Son Excellence Monsieur Louis Pinto de Sousa Coutinho, conseiller d’Etat, grand-croix de l’ordre d’Aviz, chevalier de l’ordre de Toison d’Or, commandeur de la ville de Canno, seigneur de Ferreiros et Tendaes, ministre et secretaire d’Etat pour le département des affaires interieures et lieutenant général de ses armées; et le premier consul au citoyen Lucien Bonaparte : lesquels plénipotentiaires, après l’échange respectif de leurs pleins pouvoirs, sont convenus des articles suivants :

ART. 1 – Il y aura paix, amitié et bonne intelligence entre la monarchie portugaise et le peuple français : toutes les hostilités cesseront aussitôt après l’échange des ratifications du présent traité : toutes les prises qui auront été faites aprés cette époque , dans quelle partie du monde que ce soit, seront réciproquement restistuées sans la moindre diminution : les prisonniers de guerre seront rendus de part et d’autre,sauf le paiement des dettes par eux contractées; et les rapports politiques entre les deux puissances seront rétablis sur le même pied qu’avant la guerre.
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ART. 2 – Tous les ports et rades du Portugal, tant en Europe que dans les autres parties du monde , seront fermés de suite, et le demeureront jusqu’à la paix entre la France et l’Angleterre, à tous les vaisseaux anglais de guerre et de commerce, et ils seront ouverts à tous les vaisseaux de guerre et de commerce de la République et de ses alliés.

ART. 3 – Le peuple français garantit pleinement la conservation, à la paix générale, de toutes les possessions portugaises sans aucune exception.

ART. 4 – Les limites entre les deux Guyanes seront determinées à l’avenir par le Rio Arawari, qui se jette dans l’Océan au-dessous du cap Nord, près de l’île Neuve et de l’île de la Pénitence, environ à un degré et un tiers de latitude septentrionale. Ces limites suivront le Rio Arawari depuis son embouchure la plus éloignée du cap Nord jusqu’à sa source, et ensuite une ligne droite tirée de cette source jusqu’au Rio Branco vers l’ouest.

ART. 5 – En conséquence, la rive septentrionale du Rio Arawari depuis sa dernière embouchure jusqu’à sa source, et les terres qui se trouvent au nord de la ligne des limites fixée ci-dessus, appartiendront en toute souveraineté au peuple français. La rive méridionale de ladite rivière à partir de la même embouchure, et toutes les terres au sud de ladite ligne des limites, appartiendront à Son Altesse Royale. La navigation de la rivière dans tout son cours sera commune aux deux nations.

ART. 6 – Il sera incessamment procédé à un traité d’alliance défensive entre les deux puissances, dans lequel seront réglés les secours à fournir réciproquement.

ART. 7 – Les relations commerciales entre le France et le Portugal seront fixées par un traité de commerce; en attendant, il est convenu :

  1. Que les relations commerciales seront rétablies entre la France et le Portugal de suite , et que les citoyens ou sujets de l’une et de l’autre puissance jouirent respectivement de tous page 3 les droits, immunités etprérogatives dont jouissent ceux des nations les plus favorisées.
  2. Que les denrées et marchandises provenant de leur sol ou manufactures seront admises réciproquement, sans pouvoir être assujetties à une prohibition quelconque; ni à aucuns droits qui ne frapperaient pas également sur les denrées et marchandises analogues importées par d’autres nations.
  3. Que les draps français pourront être introduits en Portugal de suite, et sur le pied des marchandises les plus favorisées.
  4. Qu’au surplus, toutes les stipulations relatives au commerce, insérées dans les précédents traités , et non contraires à l’actuel, seront exécutées provisoirement jusqu’à la conclusion d’un traité de commerce définitif.

ART. 8 – Le peuple français garantit pleinement l’exécution du traité de paix conclu en ce jour entre Son Altesse Royale et Sa Majesté Catholique, par l’intermédiaire de Son Excellence Monsieur Louis Pinto de Sousa Coutinho, conseiller d’Etat,etc., et Son Excellence le prince de la Paix, généralissime des armées combinées; toute infraction à ce traité sera regardée par le premier consul comme une infraction au traité actuel.

ART. 9 – Les ratifications du présent traité de paix seront échangées à Badajoz ou à Madrid dans le terme de vingt-cinq jours au plus tard.

Fait et signé à Badajoz entre nous, ministres plénipotentiaires de Portugal et de France, le 17 prairial de l’an IX de la République (6 juin 1801).

LOUIS PINTO DE SOUSA.(L.S.)
LUCIEN BONAPARTE.(L.S.)

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Conditions secrètes arrêtées entre les plénipotentiaires de Son Altesse Royale le prince régent du royaume de Portugal et des Algarves, et du premier consul de la République française, comme supplément au traité de paix entre les deux puissances signé dans ce jour.

ART. 1 – Son Altesse Royale le prince régent du royaume du Portugal et des Algarves s’oblige à payer à la République française la somme de quinze millions de livres tournois, dont la moitié en argent monnayé, et l’autre moitié en pierreries.

ART. 2 – Ces paiements seront faits à Madrid dans l’espace de quinze mois après l’échange des ratifications du présent traité, et à raison d’un million par mois.

ART. 3 – Dans le cas où M.d’Araujo eût conclu à Paris un traité, ou seulement qu’il eût été reçu, et que l’on eût admis sa négociation, les traités de paix de ce jour avec la France et l’Espagne , et les conditions secretes ci-dessus, sont déclarés de nul effet et non avenus.

ART. 4 – Dans le cas où malgré les traités de paix de ce jour, le Portugal évite une rupture avec l’Angleterre, le service des paquebots de correspondance entre ces deux Etats pourra continuer sur le pied actuel, sans qu’on puisse cependant l’augmenter d’aucune manière ni l’employer à d’autre chose que la correspondance.

ART. 5 – Dans le cas au contraire d’une guerre entre le Portugal et l’Angleterre, le Portugal sera traité pour l’extraction des grains de France comme la nation le plus favorisée.

Fait et signé à Badajoz entre nous ministres plénipotentiaires de Portugal et de France , le 6 juin 1801 (17 prairial de l’an IX de la République).

LOUIS PINTO DE SOUSA.(L.S.)
LUCIEN BONAPARTE (L.S.)

Le texte du traité est publié in | 152 Ko Calvo, t. 4, pp. 310-314

Pour les références bibliographiques des recueils mentionnés ci-dessous, voy. la page consacrée aux recueils de traités

La présente fiche a été réalisée dans la cadre du programme de stage du CERIC à l’Université d’Aix-Marseille.

Elle a été conçue par :

Clémentine Durand (fiche de contextualisation, correction du texte intégral, illustration, résumé)

Marie Albano (validation)

Pr. Romain Le Boeuf (sources, transcription du texte intégral)

Crédits image : Wikipédia