A propos Sabrine Dhahri

DHAHRI Sabrine est étudiante en licence droit à l'université d'Aix Marseille. Elle a réalisé un stage de recherche en droit international au sein du Céric en 2024. Au cours de ce stage, elle a rédigé les éléments de contextualisation de nombreux traités de paix présentés sur ce site, ainsi que la transcription de leurs textes. Sabrine envisage de continuer à se professionnaliser et à s'orienter en droit international public.

1762, 5 mai, Traité de Pétersbourg

Traité de Pétersbourg, 5 mai 1762

entre la Prusse et la Russie

Le traité de Pétersbourg a été ratifié le 05 Mai 1762 suite à une guerre territoriale et géographique entre la Russie et la Prusse.

Le traité de Pétersbourg a été ratifié le 5 Mai 1762 suite à une guerre territoriale et géographique entre la Russie et la Prusse.

Cette guerre a été marquée par l’accession au pouvoir de l’empereur Pierre III, grand admirateur et fervent partisan de Frédéric II de Prusse. Cette guerre est marquée par ce que l’on appelle le miracle de la maison de Brandebourg. En effet, alors que la Russie semblait avoir gagné la guerre et occupait de plus en plus de territoires, elle décida de se retirer de manière pacifique. Cette décision russe a suscité une incompréhension et à éviter une défaite sanglante de la Prusse. Ce traité évoque également l’idée d’une paix séparée entre les russes et les prussiens puisque la Prusse orientale est rendue en son intégralité contre une compensation des pertes russes subies pendant la guerre. Cette paix séparée est une aubaine pour les prussiens, qui avec l’ambassadeur Frédéric et le Roi de Prusse, ne s’attendaient plus à la restitution intégrale de leur territoire.

Enfin, ce traité signe et annonce une alliance militaire importante entre les deux pays qui ne vont pas hésiter à se défendre, protéger leur territoire. La guerre entre le Danemark et la Russie illustre parfaitement cette coalition puisque la Prusse ne va pas hésiter à envoyer ses troupes lorsque la Russie sera mise à mal.

Traité de paix entre les Cours de Prusse & Russie Le 5 mai à Pétersbourg, conclu le 24 avril, entré en vigueur le 6 mai 1762.

(Recueil du C. pe Herrzpera 2e édition Vol. I. p. 288.)

Au Nom de la Très-Sainte & indivisible Trinité.

Sa Majesté l’Empereur de toutes les Russies, étant profondément touchée par la triste situation dans laquelle se trouvent tant de peuples et de provinces à cause des conséquences de la guerre qui a éclaté entre Sa Majesté le Roi de Prusse et Sa Majesté Impératrice Reine de Hongrie et de Bohême, et étant animée du sincère désir de mettre fin aux horreurs de la guerre dans les environs de ses États dès que possible, de contribuer à rétablir la tranquillité générale en Europe, dans la mesure du possible, et de procurer à ses peuples la douceur de la paix tant désirée après tant de dépenses et d’efforts que son Empire a dû faire pour cette guerre; et Sa Majesté le Roi de Prusse, ayant exprimé sa sincère volonté de parvenir à une paix juste, solide et conforme à l’ancienne bonne harmonie et étroite entente qui ont existé autrefois entre Leurs Maisons Impériale et Royale, États, Pays & sujets respectifs et qui devra continuer à exister à l’avenir; et Leurs Majestés, malgré les circonstances de la guerre, ayant toujours conservé mutuellement les sentiments d’amitié et d’estime réciproques, ont jugé approprié de travailler sans délai à un Traité de paix, et ont en conséquence donné leurs pleins pouvoirs, à savoir Sa Majesté le Roi de Prusse les siens à Son Colonel, Aide de Camp et Chambellan éternel Bernhard Guillaume Baron de Goltz, et Sa Majesté l’Empereur de toutes les Russies au Son Chancelier, Conseiller Privé actuel, Sénateur, Chambellan actuel, Chevalier de ses ordres et de ceux de l’Aigle noir et de l’Aigle blanc.

Comte à suivre entre la Cour de Prusse & de Russie.

Comte Michel de Woronzow, lesquels après avoir produit 1762 leurs pleins pouvoirs, ont convenu, arrêté, et signé les Articles suivants d’un Traité de paix purement et simplement.

ART. 1 –
Il y aura désormais et à perpétuité une paix inviolable, ainsi qu’une sincère et parfaite amitié entre Sa Majesté le Roi de Prusse, ses héritiers et successeurs, et tous ses États d’une part, et Sa Majesté l’Empereur de toutes les Russies, ses héritiers et successeurs, et tous ses États de l’autre part, de sorte que dorénavant les deux Hautes Parties Contractantes ne commettront ni ne permettront qu’il se commette aucune hostilité secrète. ment ou publiquement, directement ou indirectement.

ART. 2 –
Comme le but des deux Hautes Parties Contractantes dans ce Traité de paix est purement et simplement de procurer à Leurs Etats et sujets respectifs la tranquillité et le repos, en faisant cesser les horreurs de la guerre, sans vouloir préjudicier aux intérêts et droits de qui que ce puisse être, S. M. l’Empereur de toutes les Russies par le même désir de voir succéder la paix en Europe en général, et en Allemagne en particulier aux fléaux de la guerre, Se réserve d’employer Ses bons offices pour moyenner cette paix entre les Hautes Parties belligérantes, dérogeant pour cet effet à tout engagement contracté par le passé qui pourrait être contraire à ces vues pacifiques et salutaires et qui devraient obliger S. M. l’Empereur à prendre part dans la guerre entre S. M. le Roi de Prusse et Ses ennemis comme partie auxiliaire ou comme partie principale belligérante.

ART. 3 –
S. M, le Roi de Prusse promet et s’engager réciproquement non seulement de ne contracter aucune alliance ni engagement qui puisse être contraire aux intérêts de l’Empire de Russie et à ceux des Etats héréditaires de S. M. Impériale en Allemagne, mais de déroger également à tous ceux qui pourraient avoir été faits par le passé autant qu’ils seraient opposés à ce

page 2

ART. 4 –
Il y aura de part & d’autre une amnestie géné tie ale & un oubli éternel de tout le passé, & les sujets des deux Parties Contractantes jouiront de tous les effets d’une pleine & entière amnestie & ne seront in quiétés en aucune façon pour tout ce qui s’est passé pendant la guerre.

ART. 5 –
Les hostilités ayant déjà cessé de part et d’autre par l’armistice conclu à Stargard le 21ème Mars dernier, la présente paix sera publiée d’abord après l’échange des ratifications.

ART. 6 –
S. M. l’Empereur de toutes les Russies pour tion des donner à l’univers une preuve éclatante que Ses dé cona’e- marches ne sont point dirigées par des vues d’intérêt et que la présente paix qu’elle fait n’est dictée que par un vrai amour pour la paix, promet & s’engage par le présent Traité le plus formellement & solennellement, que faire se peut, de restituer à S. M. le Roi de Prusse tous les Etats, Pays, Villes, Places & Forteresses appartenant à S. M. le Roi de Prusse qui ont été occupées par les armées Russiennes, pendant le cours de cette guerre, dans l’espace de deux mois à compter du jour de la signature du présent Traité. S. M. Impériale déclare de plus qu’Elle reconnaît lesdits Etats, Pays, Villes, Places et Forteresses occupées actuellement par Ses troupes, comme appartenant légitimement & duement à S. M. le Roi de Prusse et que du jour même de la restitution, ce n’est qu’à S. M. le Roi de Prusse qu’appartient l’exercice des droits de Souveraineté quelconques dans lesdits Etats, tel & ainsi que S. M. Prussienne en a été en juste & légitime possession avant le commencement de cette guerre par les titres les plus sacrés & héréditaires acquis par succession à (de) Ses ayeux.

ART entre la Cour de Prusse & de Russie.

ART. 7 –
Comme S. M. le Roi de Suède a fait connaître la paix à à S. M. Impériale de toutes les Russies par Son Ministre en cette Cour-ci le Baron de Posse, qu’elle était également intentionnée de s’employer pour rétablir la paix entre Sa Couronne et S. M. le Roi de Prusse, S. M. l’Empereur de toutes les Russies en conformité de l’Art. II. de ce Traité promet et s’engage d’employer Ses bons offices pour accélérer cet ouvrage autant qu’il pourra dépendre d’Elle, et S. M. Le Roi de Prusse s’engage à y apporter de Son côté toutes les facilités possibles.

ART. 8 –
L’échange des ratifications du présent Traité de paix se fera a St. Pétersbourg dans l’espace de six semaines à compter du jour de la signature de ce Traité.
En foi de quoi, nous soussignés Plénipotentiaires de S. M. le Roi de Prusse et de S. M. l’Empereur de toutes les Russies, en vertu de nos pleins pouvoirs, avons signé le présent Traité de paix et d’amitié et y avons fait apposer leurs cachets de nos armes.

Fait à St. Pétersbourg ce 24ème jour d’Avril an 1762.

BERNHARD GUILLAUME Bayon de Gotz.

(L. S.)

Michel Comte, de Woronzox

(C. S.)

Article séparé 1 –

Comme les circonstances critiques des affaires en Europe pourraient ne pas permettre de retirer en tout ou en partie les troupes Impériales Russiennes qui se trouvent dans lesdits Etats de S. M. le Roi de Prusse au terme de la restitution dit à l’Art. VI. S. M. Prussienne.

Le Roi de Prusse non feulement ne regardera point ceci comme une détentefdon ou violation du préfent Traité, mais il lui garanti aussi de toutefort à la très partie de ce Royaume les conféquences qu’on pourrait en apporter.

page 3

Comme une contravention au présent Traité de paix et particulièrement à l’Art. VI. mais encore donnera à Ses Gouvernements les ordres les plus précis pour satisfaire les désirs des dites troupes Impériales en tout et partout, où les demandes, qu’on leur fera, ne feront point contraires au bien et à l’avantage desdits pays. En retour S. M. Impériale promet et s’engage le plus formellement et solennellement, que faire se peut, de ne rien permettre, qui puisse tendre au défaveur et à la charge desdits Etats, et de faire passer en conséquence les ordres les plus précis et sévères aux Officiers commandants Ses dites troupes, de considérer et traiter lesdits Pays comme ceux d’une Puissance amie et alliée. S. M. Impériale déclare que tout ce que Ses Généraux et Commandants de Ses troupes pourraient entreprendre au défaveur desdits Etats sera donc diamétralement opposé à Ses volontés et qu’au moment même, qu’Elle en aura connaissance, s’enfuivront les punitions les plus sévères de ceux, qui auront osé contrevenir aux ordres donnés par rapport à l’bservation non seulement de la plus exacte discipline, mais encore et principalement à éviter religieusement tout ce qui pourrait attenter aux droits de Souveraineté quelconques uniquement et simplement dus à S. M. le Roi de Prusse comme unique et légitime Souverain desdits Etats. S. M. le Roi de Prusse ayant regardé de tout temps le bien-être de Ses Etats et sujets comme la première loi d’un Monarque, ne peut que désirer, de voir jouir enfin Ses fidèles sujets de la tranquillité de la paix, dont ils ont été privés depuis le commencement de cette guerre, pour se remettre des malheurs, qu’ils ont essuyés et pour regagner l’état de prospérité, dans lequel ils vivaient sous Son sceptre avant la présente guerre. S. M. Prussienne animée de ces sentiments souhaiterait, de voir Ses dits Etats et pays évacués des troupes étrangères le plus possible. Néanmoins Elle aime mieux dans ce moment faire taire ces considérations, qui lui sont si chères d’ailleurs, pour satisfaire au désir de S. M. Imp. et lui donner cette preuve non équivoque de la sincérité de Son amitié & estime inaltérable. C’est par la suite de cette amitié, que S. M. le Roi de Prusse consent, que lesdites troupes Impériales pendant le séjour qu’elles pourront faire dans lesdits Etats après le terme stipulé pour la restitution, jouissent des quartiers ( Obdach) tel et ainsi que les troupes de S. M. Prussienne En ont joui avant le commencement de cette guerre. S. M. Impériale s’engage en retour, que Jadite jouiffance des quartiers ne fera point étendue au delà de ce qui convient qui est le simple logement: que tout dommage et désavantage causé auxdits Etats sera à la charge de Ses troupes Impériales & que la bonification en sera faite dès que les Gouvernements desdits Etats en auront donné connaissance. S. M. le Roi de Prusse consent, que les magasins & hôpitaux appartenant auxdites troupes soient conservés et fournis tel et ainsi que la position des troupes le demandera, à condition toutefois, qu’ils ne seront en aucune façon à la charge de Sesdits Etats. Tout ce qui sera envoyé tant par mer que par terre pour l’usage desdites troupes, aura un passage libre, sans être sujet à payer aucun droit ni péage & sans être visité. Et pour obtenir que cet avantage uniquement destiné aux troupes Impériales ne soit pas étendu en faveur de ce qui n’y est point relatif ou annexe au désavantage du commerce desdits Etats, les deux Hautes Parties Contractantes sont convenues, que les Officiers & commis de S. M. le Roi de Prusse préposés aux péages ne pourront accorder ledit avantage stipulé qu’à la vue d’un passeport donné du Collège de guerre Impérial ou du Général-Commandant desdites troupes Impériales. Quoique S. M. le Roi de Prusse connaisse très-bien, combien un Pays est chargé en fournissant les chariots (Vorfpannwagen) à des troupes qui se trouvent en marche, Elle consent pourtant, ‘que lesdits chariots soient fournis auxdites troupes au prix de l’ordonnance faite pour les troupes Prussiennes, quand le besoin le requerra. S. M. Imp. promet de Son côté, de donner les ordres les plus précis, pour que Ses Officiers Commandant des troupes ne permettent aucun abus de cet avantage & donnent lieu par là aux Gouverneurs desdits Etats de porter des plaintes de violence si contraires à l’humanité & grandeur d’âme des deux Monarques. Pour ce qui est des fournitures des fourrages et provisions, que les troupes Impériales consommeraient en marche, & qui ne pourraient qu’avec difficulté être pris des magasins desdites troupes, S. M. Imp. ordonnera à Ses Généraux commandant Ses troupes, de convenir là-dessus avec des

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Entre les entrepreneurs, qui ne manqueront pas de se trouver, pour fournir le nécessaire, sans toutefois que les Etats de S. M. le Roi de Prusse en soient chargés en aucune façon. Les deux Hautes Parties Contractantes sont convenues encore entre Elles, que la valeur des espèces reste sur le même pied dans lesdits Etats de S. M. Prussienne tant que les troupes Prussiennes Impériales y séjourneront. On est pareillement d’accord, que les différends qui pourraient survenir entre les sujets des Hautes Parties Contractantes soient jugés par les Commissaires nommés en nombre égal de part et d’autre, et que les coupables soient punis selon les lois et les ordonnances de Leurs Souverains respectifs.

Cet Article séparé aura la même force et vigueur que s’il était inséré mot pour mot dans le principal Traité.

En foi de quoi nous l’avons signé et y avons fait apposer les cachets de nos armes,

Fait à St. Pétersbourg ce 24e jour d’Avril en 1762.

BERNHARD GUILLAUME Baron de Gouz.

Micaet Comte de Woronzow.

Article séparé 2 –

Sa Majesté le Roi de Prusse et Sa Majesté l’Empereur de toutes les Russies étant sincèrement intentionnées de s’unir encore plus étroitement pour la sûreté de Leurs Possessions et pour l’avancement de Leurs intérêts réciproques, Elles sont convenues de faire travailler immédiatement après la signature du présent Traité de conclu aujourd’hui ici à St. Pétersbourg, à la conclusion d’une alliance, qui puisse remplir ce but si salutaire et si avantageux pour les deux Cours.

Cet Article séparé aura la même force et vigueur, que s’il était inséré mot pour mot dans le principal Traité.

En foi de quoi nous l’avons signé et y avons fait apposer les cachets de nos armes,

Fait à St. Pétersbourg ce 24e jour d’Avril l’an 1762.

BERNHARD GUILLAUME Baron de Gouz.

( L. S. )

Micaet Comte de Woronzow.

( L. S. )

Le texte du traité est publié in

| 9,8 Mo Martens, R., t. III, n° 166, pp. 208-211

Pour les références bibliographiques des recueils mentionnés ci-dessous, voy. la page consacrée aux recueils de traités

La présente fiche a été réalisée dans la cadre du programme de stage du Céric à l’Université d’Aix-Marseille.

Elle a été conçue par :

Sabrine Dhahri (fiche de contextualisation, illustration, résumé, correction du texte intégral)

Marie Albano (correction, mise en ligne)

Pr. Romain Le Boeuf (sources, transcription du texte intégral)

Crédits image : Wikipédia

 

1700, 13 juin, Traité de Constantinople

Traité de Constantinople, 13 juin 1700

entre l’Empire Ottoman et la Russie

Le Traité de Constantinople du 13 juin 1700 est un traité signé entre l’Empire ottoman et la Russie. Il met fin à la guerre russo-turque de 1686 à 1700.

Le traité de paix de Constantinople a été ratifié le 13 Juin 1700 suite à la seconde guerre russo-turque (1686 – 1700). Ce traité met un terme à une période de conquêtes territoriales entamées par la Russie. La Turquie a du faire allégeance à la Russie en lui cédant plusieurs de ses territoires dont la ville d’Azov, ce qui représente un enjeu politique majeur. Pierre le Grand, tsar de Russie, a indexé la base navale de Taganrog tout en installant un ministère permanent à Azov. Cependant le tsar refusera de continuer à payer le tribut annuel au khan de Crimée.

Ce traité marque l’impérialisme de l’armée Russe qui après, des années de conquêtes et de guerres perdues, réussi à s’installer sur un sol étranger. Enfin, cela a permis à la Russie d’assouvir sa légitimité militaire sur la scène européenne tout en privant la Turquie de ses endroits géopostratégiques majeurs.

A – LES Guerres

Traité de Paix entre la Russie et la Turquie, signé à Constantinople, le 13 juin 1700

Note : Certaines parties du texte étaient illisibles et ont été approximativement reconstituées pour faciliter la compréhension.
La version française présentée ici est reproduite d’après Noradounghian, Recueil d’Actes Internationaux de l’Empire Ottoman, vol. I, p. 197, où il est mentionné qu’une version turque en 14 articles est imprimée dans Medjmouai, Recueil des Traités Ottomans, vol. III, p. 209. Les Traités Turcs de Hertslet, p. 753, reproduit un extrait de Schoell, Histoire Abrégée des Traités de Paix. page 2

FRENCH VERSION

ART. 1 – Il sera complètement mis fin aux hostilités résultant de la guerre qui a éclaté, par l’ordre de Dieu, entre les deux pays ; et comme, par suite de la paix qui vient d’être conclue pour l’avenir, les actes d’inimitié commis de part et d’autre seront voués à l’oubli le plus absolu dans le terme fixé sans qu’on puisse aucunement en tirer vengeance, les deux États respecteront scrupuleusement les conditions de la paix et auront soin de ne pas porter atteinte à leur repos et bien-être mutuels et d’entretenir réciproquement des rapports d’amitié et de bonne intelligence. De même, les sujets respectifs des deux États se traiteront aussi en amis, auront une bonne opinion les uns des autres, se voudront du bien et se traiteront avec amitié.
Si, à l’expiration du terme fixé, ou même à la moitié de ce terme, les deux parties désirent la prolongation de la trêve, on en conviendra de nouveau d’un commun accord et avec bonne volonté ; et les articles convenus en commun entre les deux parties pour ledit terme seront maintenus dans toutes leurs clauses sans aucune altération, soit entre nous pendant notre règne, soit entre nos successeurs et héritiers, et ils seront de même observés par nos sujets respectifs.

ART. 2 – Les châteaux de Toghan, de Ghazi-kerman, de Schahin-kerman et de Noussret-kerman, situés sur le Dnieper, seront démolis et leurs territoires seront restitués par le Czar de Russie à la Sublime Porte, qui les possédera comme avant la présente guerre, à la condition de n’y plus reconstruire de châteaux ni d’habitations.
La démolition desdits châteaux sera effectuée sans aucun retard dans le terme de 30 jours après les ratifications dont sera porteur un Ambassadeur.page 3
Les troupes, officiers et soldats, du Czar de Russie qui se trouvent dans lesdits châteaux en sortiront en toute sécurité avec tous leurs canons, munitions et vivres et se retireront sur leur propre territoire.
À leur sortie et pendant leur voyage chez eux, ils ne seront en aucun cas molestés ou inquiétés ni par les Tatars, ni par qui que ce soit des troupes et des sujets de la Sublime Porte. Mais, de leur côté également, les troupes russes et cosaques observeront une stricte discipline, soit tant qu’elles seront encore, pour le terme susdit, dans lesdits châteaux, soit lorsqu’elles se seront mises en route après les avoir évacuées, et elles ne prendront ni n’exigeront rien.

ART. 3 – La Sublime Porte sera autorisée à établir des agglomérations entourées de fossés et de digues appropriées, pour servir de ports, où que ce soit sur le Dnieper, qui est un passage pour les voyageurs et les marchands, et cela du côté situé entre le territoire du château de Toghan et le Dniéper ; mais ces établissment fortifiés ne devront pas être convertis en châteaux ou forteresses ; il n’y sera pas plaçé des canons, des munitions ni de troupes, et les bâtiments de guerre d’aucune sorte ne pourront entrer dans lesdits ports.

ART. 4 – La forteresse d’Azof et tous les châteaux anciens ou nouveaux qui en dépendent, ainsi que leurs territoires et les eaux qui se trouvent netre ces forteresses se trouvant actuellement au pouvoir du Czar de Russie, continueront à être sous sa domination sans aucune contestation.

ART. 5 – Les sujets des deux parties, confiant en la solidité de la présente paix, ne se permettront désormais pas de contestation entre eux à cause de quelques fauteurs de désordres qui pourraient exister, et les deux parties ayant en vue d’empêcher tous empiétements quelconques, elles ont convenu de laisser désert et inhabité les 12 lieues de territoire à partir de la forteresse de Pérékop et de l’extrémité du territoire du défilé de Pérékop jusqu’à la nouvelle forteresse située sur la rivière de Miouch, en-deçà du fort d’Azof. Tout le territoire qui est depuis Vendroit où se trouve la ville de Potkal dans les limites de la Russie du côté du Dniéper jusqu’à la forteresse d’Oczakow restera inculte et inhabité, excepté les nouveaux bourgs; mais on gardera des terrains suffisants dans le voisinage des faubourgs pour des vignes et des jardins. On ne reconstruira plus les châteaux démolis qui demeureront toujours déserts. L’une et l’autre partie démoliront aussi les Châteaux qui se trouveraient sur le territoire que, d’un commun accord, elles ont jugé convenable de laisser désert. On n’y construira aucun édifice ni fortification et ce territoire restera toujours désert.page 4

ART. 6 – Il sera permis de couper du bois, d’élever des ruches, de couper des foins, d’établir des marais salants, de pêcher et enfin de chasser dans les forêts, sur le Dniéper, sur les rivières qui y affluent, sur les terres et rivières converties d’un commun accord en désert qui sont situées entre le château de Miouch et l’isthme de Pérékop, comme aussi dans les endroits voisins de la Mer Noire, à condition d’y venir et d’en partir sans armes, de s’y conduire en bons voisins et d’user de bons procédés. Personne ne fera des difficultés à ceux qui viendront pour profiter de ces avanatges ; l’on n’en exigera ni Badj, ni douane, ni aucun autre droit pareil. Comme la presqu’île de Crimée et de l’isthme de Pérékop sont de terrains pierreux et que les troupeaux passaient de tout temps cette isthme pour aller paître. ils continueront à le faire comme par le passé, ils jouiront de toute sécurité et ne seront aucunement molestés.

ART. 7 – Comme il est nécessaire que la forteresse d’Azol possède aussi du côté opposé un territoire d’une étendue convenable. un périmêtre de 10 heures d’étendue, selon qu’elles se mesurent ordinairement au pas du che-val, sera assigné à cette forteresse dans la direction du Kouban. Les commissaires des deux parties éviteront toute contestation en séparant les ter. ritoires des deux États d’après la teneur du présent article et en en délimitant les frontières par des bornes sans laisser lieu à aucune discussion relative à tout ce qui existerait dans ce terrain de dix heures d’étendue. Les deux parties choisiront, en nombre égal, des commissaires intelligents et conciliants qui, à l’époque convenue entre eux. termineront cette affaire dans le plus bref délai.
Le reste du territoire demeurera, comme par le passé, sous la domination de la Sublime Porte.
Les Noghais, les Tscherkesses et autres peuples soumis à la Sublime Porte ainsi que leurs bestiaux ne seront point molestés par les Russes et les Cosaques et autres sujets du Crac de Russie qui fréquentent ces localités. De même les sujets dudit Czar et leurs bestiaux qui se trouvent dans leter-ritoire assigné à la forteresse d’A2of, ne seront point inquiétés par les Tata-les, les Noghaïs, les Tscherkesses, les Criméens et autres, et ils se conduiront en bons voisins; tout contrevenant sera sévèrement puni. Ni l’une ni l’antre partie n’élèvera rien qui ait l’air de forteresse, de château ou de bourg dans ces localités, qui resteront dans leur état actuel, et aucune des deux parties ne se permettra d’acte contraire à la paix.

ART. 8 – Les sujets du Czar, tant Russes que Cosaques et autres, s’abstiendront de tout excès au préjudice des habitants de Taman, de Crimée et des autres confins ottomans.page 5 Les pirates cosaques ne parcourront pas la mer Noire avec leurs barques et bateaux et ne causeront de préjudice à personne. On réprimera sévèrement tout excès de leur part, et s’ils violaient les conditions de la paix et les lois de bon voisinage, ils en seront publiquement et rigoureusement punis.
De même, la Sublime Porte enjoindra, moyennant des ordres précis, aux autorités des frontières, aux Khans de Crimée, aux Kalghais, aux Nourreddins et aux autres Sultans, ainsi qu’en général à toutes les tribus tatares et à leurs armées, d’avoir, par suite de leur soumission à la Sublime Porte, de respecter inviolablement les conditions de la présente paix en s’abstenant à l’avenir de toute incursion armée avec plus ou moins de troupes sur les territoires, bourgs, châteaux, villes de la grande et de la petite Russie, et de tout excès contre les sujets russes, contre les villes cosaques situées sur le Dniéper, le Don et autres fleuves, et contre les bourgs, châteaux et toutes les frontières russes du côté d’Azof. Il leur sera de même défendu de faire des prisonniers, d’enlever leurs bestiaux, de leur causer aucun dommage ni secrètement ni ouvertement, et enjoint d’entretenir constamment des rapports de bon voisinage et d’harmonie. S’ils inquiétaient les sujets du Czar et commettaient contre eux des actes d’injustice et de violence, aussitôt qu’on en aura eu connaissance, personne ne les défendra et ils seront punis sans miséricorde d’après la loi et la justice.
On recherchera et restituera de part et d’autre aux propriétaires tout ce qui aura été l’objet de déprédations.
Ceux qui se seront rendus coupables de négligence et de désobéissance dans ces enquêtes recevront la punition qu’ils ont méritée; Les individus qui prendront à tâche de violer les articles et les conditions de cette paix en se livrant à des actes contraires aux ordres émanés seront sévèrement punis, pour que cela serve d’exemple aux autres. On s’abstiendra absolument durant la trêve convenue de toute action militaire et de toute transgression, et l’on empêchera par des injonctions aussi sincères que précises tout acte qui serait incompatible avec la présente paix.
Conformément à l’ancien usage, les deux parties s’empresseront de faire annoncer sur les frontières la conclusion de cette heureuse paix et des fermans ordonneront qu’elle soit respectée jusqu’à la fin de la trêve.
Tout individu qui se rendrait coupable à l’avenir d’une transgression quelconque, sera rigoureusement puni. L’empire de Russie étant un état indépendant, le Tzar et ses successeurs n’auront pas l’obligation de payer ni pour le passé, ni pour le présent, ni pour l’avenir le tribut annuellement donné jusqu’ici au Khan de Crimée et aux Criméens. Mais de leur côté aussi, le Khan de Crimée, les Criméens et les autres peuples page 6 Tatars respecteront la présente paix et ne la violeront pas par des demandes de tribut ni sous d’autres prétextes.

ART. 9 – Les prisonniers faits par les deux parties avant la conclusion de la présente paix et qui sont restés dans les lieux de détention seront échangés à la faveur de cette paix et successivement mis en liberté ; et s’il se trouvait un plus grand nombre de prisonniers de marque entre les mains de l’une ou de l’autre Puissance, il sera ultérieurement permis de solliciter aussi leur élargissement. Ils seront traités avec les égards dus par la dignité des deux parties et d’une façon convenable à la présente paix. Pour le reste des prisonniers qui sont en la possession d’autres personnes et auprès des Tatars, on s’efforcera d’obtenir leur mise en liberté en les rachetant, autant qu’il serait possible et convenable, à des prix justes et modérés. Mais s’il devenait impossible d’amener un accord entre les deux parties, on paiera la somme qu’ils auront coûtée et qui aura été constatée, soit par preuves, soit par serment. Il sera permis de traiter à l’amiable soit du rachat, soit de l’échange des prisonniers faits durant la guerre.
Les juges s’attacheront à mettre d’accord tous les intéressés et à vider les contestations qui surgiraient au sujet de l’élargissement de tels prisonniers, et cela d’une manière convenable et propre à satisfaire les deux parties.
Si, durant le terme de la présente paix, on fait des prisonniers sur le territoire du Czar de Russie et qu’on les découvre ensuite en Crimée, dans le Kouban ou dans quelque autre partie des états de la Sublime Porte, parmi les Tatars et les Tscherkesses, ils seront élargis et restitués sans rançon.
Les agents du Czar de Russie qui, munis de sauf-conduits, voyageraient dans les autres pays pour la libération des prisonniers Russes, pourront parcourir les Etats ottomans, tant qu’ils se borneront à s’occuper exclusivement de leur mandat ; ils ne seront pas molestés et ceux qui, contrairement à la loi, recevraient de tels agents et leur causeraient des dommages, ne maqueront pas d’en être punis.
Mais comme l’élargissement des prisonniers qui se sont faits musulmans sera impossible, on devra s’abstenir absolument de chercher à les débaucher.

ART. 10 – Bien que le rétablissement des rapports commerciaux dût être un des fruits de cette paix et qu’il dût développer la prospérité des deux états, l’Envoyé actuel de Russie n’ayant toutefois pas de pleins pouvoirs pour cet objet, on s’est réservé de négocier sur les relations commerciales des deux pays avec l’Ambassadeur que la Cour de Russie en verra, page 7 dans la rédaction des lettres autographes et des autress documents, les titres usités.
Ansi, c’est pour que la paix et trève convenue et renouvelée d’après les articles qui précèdent soit inviolablement respectée à l’avenir, que le présent instrument a été échangé entre les parties.

Ecrit dans la lune de Sefer 1112.

Le texte du traité est publié in

| 1,4 Mo Parris, vol. 23 pp. 31-37

Pour les références bibliographiques des recueils mentionnés ci-dessous, voy. la page consacrée aux recueils de traités

La présente fiche a été réalisée dans la cadre du programme de stage du CERIC à l’Université d’Aix-Marseille.

Elle a été conçue par :

Sabrine Dhahri (fiche de contextualisation, illustration, résumé, correction du texte intégral)

Marie Albano (validation, mise en ligne)

Pr. Romain Le Boeuf (sources, transcription du texte intégral)

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